25 / 10 / 2020

Chartreuse Backyard… l’art délicat de la torture

J’ai la larme facile. Ça fait chier, mais voilà, je dois être l’un des rares types à avoir versé ma larmichette lorsque l’Alien est expulsé du vaisseau dans le vide intersidéral à la fin du Huitième Passager, et ne parlons pas de la rafale stoppant Bébel à la fin du Professionnel. Bref, je suis bon public, et pas qu’au ciné. Alors quand lundi 19 octobre à 11 h, mon poulain est parti en boitant pour réaliser son tour de la victoire, j’ai senti de l’humidité perler au coin de mes yeux.

Mon poulain, c’est Christian Mauduit, un mélange de Terminator, John McClane, Bozo le clown et Hannibal Lecter : il est inarrêtable, rusé, rigolo et d’une méticulosité clinique. Christian, je le connais depuis une quinzaine d’années, via feu le forum Ultrafondus1, et on a couru ensemble à quelques reprises sur des courses officielles et officieuses. Il y a quinze ans, on avait grosso modo le même niveau sportif. Aujourd’hui, un gouffre genre faille de San Andreas nous sépare : il a chopé un niveau stratosphérique en ultra, sans pour autant choper le melon ni se prendre trop au sérieux (ce qui n’est pas le cas de tous les cadors en ultra, ouh la la).

Il a chopé un niveau stratosphérique en ultra, sans pour autant choper le melon

Et c’est ça que j’apprécie tout particulièrement chez Christian : il démontre qu’un humain ordinaire (avec un taf, une famille, des loisirs) peut réaliser des choses absolument extraordinaires (au sens propre) pour peu qu’il s’en donne les moyens. Ce genre de choses va du marathon en 2h522 (à deux doigts du cap qui fait rêver – 2h48, soit 15 km/h), à 871 km sur 6 jours (les connaisseurs apprécieront), en passant par 9h08 au 100 km, 225 km sur 24 heures, le Paris-Brest-Paris en 59 heures (c’est du vélo pour les incultes), 710 km sur 6 jours en marche athlétique, un tour complet sur la Barkley3 pour sa première et unique participation, 12h06 sur Ironman4 et 445 heures sur Double Deca-Ironman (oui oui, 20 fois un Ironman, pas la peine de se faire des nœuds au cerveau, c’est complètement débile), 381 heures sur la Transpyrenea5, ou 30h41 au Spartathlon6. Rien qu’à écrire ça, j’ai pris une suée.

Le transfert entre les différents sports d’endurance : éparpillez-vous, ça fait du bien au corps et à la tête

Cet extrait de palmarès n’est pas là pour en mettre plein les yeux, mais plutôt pour mettre en avant un second point qui me plait particulièrement chez Christian : il n’est pas monomanie. Il court, il pédale, il nage, il marche, il participe à des épreuves sur piste, sur route, sur sentiers, en montagne, dans des parcs, en indoor, des épreuves rapides, ultra-longues, des trucs intimistes ou des grands raouts. Pour Christian, dans le sport, c’est un peu comme dans le cochon, n’en déplaise aux vegans : tout est bon. Et ça démontre une fois de plus le transfert entre les différents sports d’endurance : éparpillez-vous, ça fait du bien au corps et à la tête, et ça vous permettra de durer.

 

Et donc, retour au 19 octobre 11 h : j’ai les yeux humides, et ce n’est pas à cause de ce foutu brouillard qui noie le stade de Saint-Laurent-du-Pont depuis trois jours (les mauvaises langues diront depuis toujours). Car oui, la course dont il s’agit ici se déroule à deux pas et demi de chez moi, en Isère, en bordure du massif de la Chartreuse. Le concept est simple : parcourir chaque heure une boucle de 6,706 km jusqu’à ce qu’il ne reste plus qu’un seul coureur en piste qui est alors déclaré vainqueur. Pourquoi 6,706 km ? Parce qu’en réalisant cette distance chaque heure pendant 24 heures, on parcourt alors 100 miles (160,934 km). Et 100 miles en 24 heures, c’est tout rond, tout joli, et ça cause pas mal à tous les coureurs qui se sont amusé à faire le hamster sur une course horaire, au hasard un 24 heures.

Le but n’est pas de détruire du quadriceps à tour de bras, mais de confronter des humains à l’inconnu

Le nom de cette course : la Chartreuse Backyard Ultra, Chartreuse comme le massif (ou comme la liqueur pour les alcolotrailers), ultra parce qu’on court au-delà du marathon (enfin si on n’est pas une demi-portion), et backyard parce que c’est une épreuve d’arrière-cour, de champs, de jardins – ni de la piste, ni de la route, ni du gros trail qui tache, mais bien du petit sentier pépère pimenté d’herbes, racines et petites bosses. Le but n’est pas de détruire du quadriceps à tour de bras, mais bien de confronter des humains à l’inconnu.

 

Car oui, lorsque tu prends le départ d’une course, tu sais TOUJOURS où se situe la ligne d’arrivée. Un marathon : 42,195 km plus loin. Le Spartathlon : 246 km plus loin. Un 24 heures : 24 heures plus tard. La Marmotte : 177 km plus loin (ça aussi c’est du vélo pour les doubles incultes). Mais là, sur ce type de course, appelée « Last One Standing » (Dernier homme debout – traduction française fausse puisque l’homme peut se révéler être une femme, sans féminisme aucun), il n’y a ni distance, ni temps pour circonscrire le périmètre de l’épreuve. Dans ce principe de dernier coureur en lice, en prenant le départ, tu ne sais pas si tu t’engages pour 20 heures, 45, 72… Tout dépend bien sûr de tes capacités, mais aussi de celles de tes adversaires. Ainsi, si le dernier homme debout est bien déclaré vainqueur, c’est surtout que tous ses adversaires ont été déclarés perdants. La défaite des uns fait la victoire de l’autre. Putain c’est beau, j’en pleurerais si je n’avais pas déjà la larme à l’œil.

 

Et donc, à quelques détails près, on se retrouve ainsi plongé dans le roman Marche ou crève de Stephen King, une lecture que je conseille à tout coureur d’ultra qui se respecte – et même à ceux qui ne courent pas, tiens. Rappel : dans un futur dystopique (Larousse est ton ami si tu en es resté au Grand Meaulnes au collège), chaque année une grande marche suivie par tout le pays fait se confronter 100 jeunes hommes. Chaque marcheur est équipé d’un appareil qui mesure précisément sa vitesse. Tout marcheur descendant sous les 6,5 km/h reçoit un avertissement. Au bout de trois avertissements, il est exécuté (au sens propre hein, avec une bonne bastos dans le buffet). Le dernier marcheur debout gagne. On notera une vitesse sur la Backyard proche de celle du roman, et on regrettera que les organisateurs se soient dégonflés par rapport à l’exécution, qui a tout de même plus de gueule qu’une simple élimination. Et là où l’auteur de thriller, science-fiction, épouvante, a fait fort, c’est qu’il a senti ce qui se passerait au sein du peloton dans une telle épreuve : passée la phase d’observation et de confrontation directe, l’ambiance change et les coureurs solitaires se transforment en coureurs solidaires, s’épaulant l’un l’autre pour aller le plus loin possible.

Sur la Backyard on regrettera que les organisateurs se soient dégonflés par rapport à l’exécution, qui a  plus de gueule qu’une simple élimination

Justement, petit tour d’horizon des coureurs en lice lors de cette Chartreuse Backyard Ultra histoire de voir quelles peuvent être les profils (sont-ils tous trépanés ?) et les motivations (faillite, divorce, licenciement ?) pour se lancer sur une telle épreuve.

 

Rémy Jégard : Rémy est un bon coureur, plutôt rapide, qui a accumulé beaucoup d’expérience en plus de 20 ans de course à pied. Il tente sa chance ici après avoir participé à plusieurs reprises à la Barkley, mais il est néophyte en course horaire. Il souffre rapidement (genou, psoas) et se résout à l’abandon après 26 tours effectués (174 km), pas mécontent d’avoir atteint son objectif de 24 tours minimum.

 

Aurélien Sanchez : 29 ans, taillé pour la course à pied, déjà vainqueur d’une épreuve similaire, il abandonne avec 28 boucles (188 km), un genou bien douloureux, un peu déçu de sa prestation. Aurélien avait beaucoup misé sur la récupération, venant avec un matelas digne d’un grand hôtel américain et un rouleau de massage de mollets et ischios-jambiers. Raté.

 

Guillaume Arthus : le physique le plus impressionnant du peloton, un jeune coureur (30 ans) qui peut aller loin, très loin, qui le sait parfaitement, et fait ainsi montre d’une grande ambition. Sauf que le physique ne fait pas tout : de petites erreurs (changement de vêtements trop tardif, une couverture dans l’espace de repos très vite trempée par sa transpiration, des tours peut-être un peu trop rapides) ont fini par déclencher une crise d’hypothermie à Guillaume au moment précis où il aurait dû se trouver sur la ligne de départ. Ah oui, j’ai peut-être omis ce détail qui n’en est pas un : chaque coureur doit se trouver à l’heure précise au départ (l’heure étant rappelée par une corne de brume 3 mn avant, 2 mn, 1 mn) de la boucle, sinon il est éliminé. Et une fois le départ pris, il ne peut revenir à l’espace de repos, sinon il est éliminé. Et bien sûr il ne peut recevoir d’assistance pendant la boucle, sinon il est éliminé. Règle cruelle égale élimination cruelle après 30 boucles (201 km). Guillaume l’a mal pris sur le coup, on le comprend. Revanche l’année prochaine ?

Elle a laissé beaucoup de forces dans la bataille (et pas mal de quiches sur le parcours)

Alexandra Rousset : au top niveau de l’ultra-trail français il y a quelques années, Alexandra reste très compétitive et compétitrice – pas question de prendre le départ d’une course pour faire de la figuration. À domicile, elle n’aurait loupé cette course pour rien au monde. Après une quinzaine d’heures, elle commence à souffrir de troubles digestifs, peut-être comme Guillaume pas assez vêtue et trop rapide ? Pendant 10 heures, elle lutte contre elle-même, et retrouve un semblant de contrôle sur son corps. Mais elle a laissé beaucoup de forces dans la bataille (et pas mal de quiches sur le parcours), et met le clignotant au bout de 31 boucles (208 km).

 

Liess Makhlouf : déjà présent l’année dernière ici même, il avait réalisé 27 tours. Rapidement, les jambes tirent, mais son assistante le masse scrupuleusement, et il tient bon, au courage. Il finit avec 36 tours (241 km), dégommé, mais très satisfait de sa prestation.

 

Maxime Gaudin : 33 ans, physique de coureur de fond, il a gagné ici l’année dernière avec 41 tours. Concentré, tout se passe bien, sauf que la fatigue le gagne rapidement. L’entrée dans la deuxième nuit lui est fatale : il court pratiquement en dormant. Maxime stoppe à 37 tours (248 km). Bonne nuit !

Le releveur de son pied gauche le lendemain ressemblait davantage à un gigot qu’à un releveur.

Dominique Jacquemet : la preuve vivante qu’il ne faut jamais se fier aux apparences. Vêtu de manière originale (vous vous souvenez des coureurs à pied dans les années 80 ?) et particulièrement bariolée, Dominique prête à sourire lorsqu’on le voit passer. Mais c’est sur sa foulée qu’il faut s’attarder : souple, aérienne, elle ne se dégrade que très peu au fil des heures, et il dure, il dure… Malgré une douleur au genou, il poursuit, motivé par l’organisation qui « le pousse au cul » sans trop de ménagement – « mais si tu peux en faire un de plus, allez Dominique ! » Il stoppe également à 37 tours (248 km) après avoir jeté sa puce – « non cette fois vous ne m’aurez pas ! »

 

Matthieu Tharion : déjà finaliste sur une épreuve similaire, il lâche l’affaire cette fois-ci avec 38 tours (255 km), discret mais efficace.

Guillaume Calmettes : sans aucun doute le favori de cette épreuve, avec une victoire en 59 heures l’année dernière sur la finale américaine de la Big Dog’s Backyard Ultra. Mais cette fois, la fatigue envahit Guillaume, il est victime d’hallucinations, a peur de tomber dans le torrent qui borde le circuit (alors qu’au contraire ça l’aurait réveillé, un bon bain de minuit, non ?), et s’arrête après 40 boucles (268 km).

Claire Bannwarth : la personnification de la ténacité. Claire lutte pratiquement de bout en bout, sans assistance, en passant le plus de temps sur le terrain et donc en ayant le moins de temps de repos. Une vraie guerrière qui a tenu bon jusqu’à 41 tours (274 km). À voir pour le croire.

Valery Caussarieu : second essai sur cette épreuve, il a été finaliste l’année dernière. Valery promène ses énormes cuissots de trailer tracteur sur le parcours de manière détendue, avec une belle fraîcheur malgré le peu de repos qu’il s’octroie. Il résiste à la seconde nuit, mais lâche l’affaire après avoir passé les 300 km en 45 tours (302 km). Abandon psychologique ? Peut-être un peu mais pas que, le releveur de son pied gauche le lendemain ressemblait davantage à un gigot qu’à un releveur.

Christian Mauduit : nous voici donc de retour avec Christian qui part pour son 46ème tour après l’abandon de Valery. La règle veut que pour valider sa victoire, il doit terminer seul cette ultime boucle. Et si je ressens un soupçon de tristesse à ce moment, ce n’est pas parce que Christian, dont j’assurais l’assistance sur cette course, va gagner ; non, c’est parce qu’il va DÉJÀ gagner. En 46 heures. Lui qui avait déjà couru à plusieurs reprises 48 heures sans prendre de vrai temps de repos, et qui savait donc qu’il pouvait gérer cette première phase, lui qui avait espéré profiter de cette épreuve pour explorer un nouvel aspect de l’ultra-endurance. Pas de bol, comme dirait l’autre, car la règle mentionne que le vainqueur doit s’arrêter après cette ultime boucle. Parce que le connaissant le gars Christian, sans cette règle, il aurait continué, juste pour voir, pour le fun, pour la gloire peut-être un peu aussi. Le repos et les réjouissances auraient pu attendre. Mais après tout, on est dans le « dernier homme debout », et c’est bien lui, le dernier homme debout.

Les coureurs de la Backyard se transforment les uns après les autres en pingouins léthargiques

Sauf que dans 20 autres pays dans le monde, simultanément, se déroule exactement la même épreuve. Car pour remplacer la finale des Backyard Ultra propres à chaque pays, finale qui aurait dû se dérouler aux USA, et qui a bien évidemment été annulée pour cause de Covid-19, Lazarus Lake (dit Laz), Gentil Organisateur de la Barkley et de la première des Backyards, la Big Dog’s Backyard Ultra, a décidé d’organiser une « finale à distance » faisant se confronter les meilleurs coureurs de chaque pays sur leur propre parcours.

 

Petit retour en arrière : c’est en 2012 que Laz (de son vrai nom Gary Cantrell, comptable dans l’état du Tennessee et sosie des ZZ Tops) décide d’organiser la Big Dog’s Backyard Ultra sur son terrain, derrière chez lui. Il a envie de renouveler ses plaisirs sadiques après avoir fait souffrir depuis déjà tant d’années les coureurs du monde entier sur la Barkley (créée en 1986). Il pense donc à ce concept de course au dernier homme debout, le met en œuvre, et rencontre son petit succès dans le monde des doux dingues de la course à pied (mais s’agit-il encore de course à pied ?). La mayonnaise prend si bien que d’autres épreuves similaires voient le jour dans le monde (plus on est de fous, plus on rit, n’est-ce pas ?), et que certaines d’entre elles s’affilient à la Big Dog’s, faisant de celle-ci une finale annuelle. C’est dans ce contexte qu’est née la Chartreuse Backyard Ultra en 2019, et que s’est organisée la finale à distance d’octobre 2020.

 

Chacun des 21 pays en lice avait donc la possibilité d’aligner ses 15 meilleurs coureurs (ou à défaut ceux suffisamment fous pour dire oui) pour déterminer d’une part le meilleur pays (cumul du kilométrage de chaque coureur) et d’autre part le meilleur coureur (le dernier en lice, sous-entendant donc les deux derniers en lice, puisque lorsque l’avant-dernier coureur abandonne, le dernier doit s’arrêter au tour suivant comme on l’a déjà vu). Il est à noter que ces deux règles n’ont été réellement couchées sur le papier que quelques heures après le départ simultané de la course dans chaque pays. C’est certes curieux, mais ceux qui connaissent Laz n’en seront pas plus étonnés que ça.

Chiant de se taper des boucles de 120 mètres de long, mais bordel ça change la donne de ne pas se les cailler (les doigts)

Toujours est-il que les Français ne sont que 13 au départ sur les 15 possibles, mais que malgré ce handicap ils resteront l’équipe au complet le plus longtemps, soit 26 heures. Belle performance. Parmi les autres pays, on trouve de tout : États-Unis bien sûr, mais aussi Japon, Biélorussie, Suède, Russie, Inde… Le niveau des coureurs est très inégal, et certains pays perdent des membres, voire leur équipe complète, plus vite qu’il ne faut de temps à un trailer pour ouvrir sa bière après avoir franchi la ligne d’arrivée d’un ultra. C’est dire. Et puis il n’y a pas que le niveau des coureurs qui est inégal : les parcours bien sûr n’ont pas grand-chose à voir entre eux. Si celui des Français est plutôt plat (10 mètres de dénivelé au tour), et peu technique (quelques racines, caillasses, de la cendrée pourrie, mais rien de bien méchant), ce n’est pas le cas de tous, par exemple les Espagnols qui annoncent 150 mètres de dénivelé au tour. Et troisième inégalité (mais en 2020 on est habitué aux inégalités non ?) : les conditions météorologiques. Les Suédois se tapent -4°C lors de la première nuit, alors que les Belges, victimes d’un couvre-feu (il court il court, le Covid, le Covid 2019, il est passé par ici, il repassera par là…), passent la nuit à courir au chaud dans leur gymnase. Certes, c’est chiant de se taper des boucles de 120 mètres de long, mais bordel ça change la donne de ne pas se les cailler (les doigts) entre 21 h et 6 h du matin. Non ?

 

Bref, c’est une première, c’est fait avec les moyens du bord, les règles n’étaient pas forcément claires avant le départ, les contraintes sanitaires étaient fortes, et mine de rien, malgré les « petits » inconvénients que l’on vient de voir, tout se déroule plutôt bien, et on a droit à une belle finale à distance, avec de beaux tableaux Excel qui montrent la progression en quasi direct de chaque nation7. Les Français, grâce à la belle performance collective et aux 46 heures de Christian, parviennent à se hisser à la cinquième place. Les Mexicains accrochent la troisième place grâce aux célèbres Tarahumaras et leurs inévitables sandales (vainqueur en 64 tours). Aux État-Unis, c’est la très solide Courtney Dauwalter qui gagne avec 68 tours, devant ses 14 compatriotes. Et ce sont les Belges que l’on retrouve à la première place, avec le désormais célèbre (toutes proportions gardées, on n’est pas encore tout à fait au niveau de Zinédine Zidane) Karel Sabbe et ses 75 tours (502,95 km tout de même).

Personne n’a repoussé les frontières de l’endurance lors de cette épreuve

Alors non, contrairement à ce que quelques canards l’ont écrit8, personne n’a repoussé les frontières de l’endurance lors de cette épreuve. Les kilométrages abattus sont certes spectaculaires, mais ils restent en-deçà de ce que l’on peut voir sur des épreuves plus habituelles comme des 24 ou 48 heures. Revenons à Christian par exemple, qui a réalisé 46 tours et donc 308 km. Son record sur 48 heures est de 382 km – 74 km de plus en deux heures de plus. Le record du monde sur 48 heures est de 473,495 km (Yiannis Kouros, 1996, Surgères). Alors la Backyard, petits bras ? Pas vraiment, car lorsque l’on se projette dans le temps, si l’épreuve venait à durer, comme en Belgique (75 heures donc), le kilométrage se rapproche de plus en plus du kilométrage d’une course horaire traditionnelle. Et si des fous furieux parvenaient à durer vraiment longtemps, au pif 6 jours, on s’approcherait vraiment des meilleures performances mondiales sur course horaire : 6 jours, soit 144 heures, c’est 965 km sur la Backyard (144 fois 6,706), pour un record du monde à 1036,8 km (Yiannis Kouros, encore lui). À titre de comparaison, Christian dispose d’un record à 871 km. Ça pique !

 

Pour conclure, parce que j’imagine que vous n’avez pas que ça à faire, après avoir vu les coureurs de la Backyard se transformer les uns après les autres en pingouins léthargiques, après les avoir vus grimacer, vomir, pleurer, se lamenter, jurer « plus jamais », on ne peut que fuir ce genre d’épreuve (genre loin, très loin). À quoi bon ? Et puis comme un nigaud, on se dit que 6,706 km en une heure, franchement, ça va. Je suis sûr que je peux tenir 24 heures. Ou peut-être même un peu plus. Hhhmmm… À l’année prochaine ?

Par Emmanuel Lamarle


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